Retrouvez ces photos dans la galerie ‟Villes”
Dans un jardin public, tu es là, assise sur un banc à lire un livre dans lequel tu sembles avoir du mal à rester plongée, tant ton regard vogue souvent ailleurs, tout autour de toi.. Quoi donc a pu ainsi rompre ta bulle ? Qui, peut-être ? Discrètement, je te regarde, t’observe.. Ton apparente nervosité parasite cette douceur qui, pourtant, semble émaner de toi. Plus je te vois, plus je suis intrigué, plus l’envie d’intervenir se fait sentir : comment te faire retrouver ta bulle ? Mais, je le sais, je ne fais pas partie de ton univers, je ne suis qu’un inconnu parmi des milliards sur cette petite planète.
C’est un mouvement d’humeur pourtant anodin qui me fait me lever et me diriger vers toi. Plus je m’approche, plus je te vois fébrile, comme agacée par je ne sais quel tracas. Alors que j’arrive à quelques pas de toi, tu me fixes d’un regard à la fois surpris et méfiant. Oh, ce n’est pas à toi que j’en veux, mais à ce bout de banc libre à ta droite. Je te demande si je peux m’y assoir ; apparemment oui ; je m’y assieds donc. Mais, toujours interloquée, je sens que je te dois une explication..
– C’est un livre qui parle de quoi ? dis-je en guise d’entrée en matière particulièrement “originale”...
– De la Vie, de la Mort et des chemins qui vont et viennent de l’un à l’autre...
– Vaste programme ! Tu en es à quelle chapitre ? Je crois en être à celui où le héros, en possession de son “trésor”, vient de monter à bord du bateau de la Vie et au moment où ce dernier appareille..
– Alors tu ne connais pas encore le plus beau...
– Je compte sur toi pour me le présenter..
C’est alors un beau sourire qui s’affiche sur ton visage, comme si j’avais prononcé la formule magique.. D’ailleurs, tes yeux amandes sont devenus presque demi-lunes ! Je ne sais ce qui retient le plus mon attention à ce moment là : l’éclat de tes yeux, la douceur de tes joues, le sourire sur tes lèvres ou tes mèches de cheveux trop courtes pour êtres attachées et qui caressent délicatement le haut de ton cou délicieusement dégagé. Ta peau légèrement hâlée semble être un doux mélange de soie et de satin et je ne peux retenir ma main qui vient effleurer ta joue du revers, doigt après doigt, pour descendre sur ton cou, alors que je plonge mes yeux dans les tiens... J’ai à peine le temps d’être surpris par la profondeur et l’intensité de ton regard car, presque immédiatement, je sens ta main passer autour de ma taille, comme la porte ouverte à tes lèvres..
Je sens que tu retiens ton souffle autant que je sens ton cœur battre et je me sens moins seul dans mes émotions.. À mesure que je brule les étapes en prenant presque le chemin le plus court, de quelques légers frôlements, nos lèvres entrent finalement en contact, d’abord très délicat, puis de plus en plus marqué, mais sans précipitation.. Sur ce, tu te lèves et me tends la main.
– On y va ? me demandes-tu.
Je prends ta main et nous voilà en route vers d’inconnus instants. Curieusement, c’est vers mon immeuble que tu m’emmènes. Quand je te le fais remarquer, ta réponse est un sourire presque malicieux, accompagné d’un bel éclat dans tes yeux.
Comme par enchantement, nous voici chez moi et c’est dans la pénombre des persiennes au soleil couchant que je découvre ta silhouette que je croyais pourtant avoir vue au jardin public.. C’est alors que tu t’approches face à moi, que tu poses tes avant-bras sur moi, tes mains de chaque côté de la base de mon cou. Tes gestes et ta voix sont d’une douceur toute particulière. Mais voici que tu me parles sur un ton plus solennel, c’est du moins l’impression que j’ai car, étrangement, c’est dans une autre langue que sortent tes mots. Pourtant, je ne suis ni surpris ni perdu, comme s’ils s’agissait d’une langue universelle, celle du cœur... Longuement tu me parles, sérieusement je t’écoute, presque religieusement tant les mots se font mélodie harmonieuse aux doux contrastes. Aux mots s’ajoute la gestuelle, il semble que ce soient des conseils que tu me dispenses, des conseils qui, manifestement, me “parlent”.. Apparemment, ton but semble être atteint : mon horizon s’éclaire, levant ainsi progressivement le voile sur cette route qui est la mienne.. Mais il se fait tard, je sens que tu fatigues, ça fait maintenant un long moment que tu m’expliques des tenants et des aboutissants dans ce langage si propre à la Vie ! Comme tu t’endors debout dans mes bras, je t’emmène plonger dans un sommeil réparateur sous la chaleur protectrice de ma couette et je m’allonge à tes côtés, tel un veilleur discret. Mais je ne rate rien de ce splendide spectacle que tu m’offres : à mesure que tu plonges loin vers tes songes, ton visage se détend et, alors que tu saisis mon bras pour tu t’y enrouler, c’est un sourire satisfait qui illumine ton visage. Avant de fermer les yeux et de plonger à mon tour dans le grand bain de la nuit, je glisse quelques baisers sur ta joue, ton cou, ta nuque.
Peu après, j’ouvre les yeux, je regarde autour de moi et, à part moi dedans, le lit est vide, tu n’es pas à mes côtés. Ta place est d’ailleurs froide et ton délicieux parfum ne flotte pas dans l’air de la chambre.. Je me lève et le réveil, cet animal sans cœur, me dit froidement que nous sommes le matin. Je te cherche toujours du regard, dans toutes les pièces de l’appartement, sans te trouver et, à mesure que les questions me viennent à l’esprit, je vois ton livre, là sur la table basse du séjour... Pourtant, je suis sûr de t’avoir bien croisée, j’ai bien senti ta présence toute proche ! Mais l’appartement est bien fermé à clé de l’intérieur et la sécurité de la porte est bien engagée... L’Alchimiste, décidément, fait encore des siennes...
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Voilivoilou ...